Changer de culture
17 avril 2024

Et si la culture des Peuples Premiers pouvait nous reconnecter à nos racines …

Marine Simon Facilitatrice en Intelligence Collective et Gouvernance participative

Marine Simon

* Illustration Jérémy Van Houtte in Tout tourne rond sur cette Terre, nous sommes les seuls à l’ignorer, éd. Yves Michel, 2021

Changer "de" monde

Changer « le » monde peut nous paraître inatteignable. Mais changer « de » monde est à notre portée à toutes et tous !

Dans cette rubrique, je vous propose des changements de regard et des pratiques concrètes simples et pourtant hautement transformatrices de notre culture et proposant de retisser nos liens avec nous-mêmes, les autres humain.e.s et les autres qu’humains.

 

Une expérience de l'unité

Récemment, les peuples autochtones ont été (enfin !) reconnus comme acteurs majeurs de la protection des espèces et des écosystèmes. Et pour cause, ils occupent les 25% de la surface de la Terre où se concentre 80% de la biodiversité, parce que, depuis des millénaires, ils ont su en prendre soin !

Les Peuples Racines se conçoivent comme gardiens de la Terre. Il sont très conscients qu’ils ne reçoivent toute la merveille du Vivant qu’en prêt, le temps de leur existence. Très conscients aussi de la puissance et de la fragilité de cette grande trame d’interrelations entre tous les éléments visibles et invisibles qui permettent la vie. Prendre soin de tout cela jusqu’à la 7egénération est la mission qu’ils se donnent. En cherchant les raisons de ce chiffre, j’ai découvert qu’il était issu de leur conscience que le Vivant répond toujours au traitement qu’on lui inflige, avec un effet retard.

Et nous ? A chaque génération nous avons dégradé un peu plus la toile de la vie, nous en avons fait disparaître de précieux fils de trame. Chaque génération n’a eu de cesse de dépasser la précédente dans ses prouesses techniques. Nous nous sommes payés tout ce que nous avions les moyens financiers ou techniques de nous payer… sans jamais nous demander si la Terre pouvait se le payer, elle… 

Si chaque génération représente une tranche de 25 à 30 ans, les boucles de rétroaction climatique, d’effondrement de la biosphère, … seraient donc les réponses du Vivant au traitement que nous lui avons fait subir il ya 140 ans, c’est-à- dire la fin du XIXe siècle… 

Pour moi, ce qui marque la différence essentielle entre leur culture et la nôtre est qu’ils considèrent la Terre, comme notre Terre-Mère et les humains.es comme une espèce parmi d’autres et non «supérieure».

Pour beaucoup d’entre eux, le Soleil est notre père, l’eau notre grand-mère et les rochers notre grand-père.

Notre culture, elle, conçoit la Terre, au mieux, comme un support sur lequel se déplacer ou un immense hypermarché d’où extraire tout ce qui nous fait envie, où nous nous débarrassons de tout ce qui nous lasse, sans aucune considération pour les limites planétaires, son rythme de production, la vitesse à laquelle la biosphère (la Terre et son habit de vie) est en capacité d’intégrer, dégrader nos surplus.

Pour moi, ce qui fait la graine de notre culture est une croyance de séparation entre nous et l’ensemble du Vivant qui attise notre compulsion à la prédation et à l’accaparement. 

Alors que ce qui fonde la culture des Peuples Racines, où qu’ils vivent, et sans s’être jamais rencontrés, c’est l’unité du tout.

 

Lors d’un atelier Tout tourne rond sur cette Terre que j’animais il y a quelques mois, une participante m’a fait remarquer qu’elle ne comprenait pas en quoi il était intéressant de remplacer une croyance par une autre. Mais l’unité n’est pas une croyance. C’est une expérience ! 

 

Outil

Explorons, si vous le voulez bien :

  • La Terre vous porte-t-elle chaque jour, depuis votre naissance, même les plus mauvais jours ?
  • Le Soleil vous éclaire-t-il, vous réchauffez-t-il chaque jour depuis votre naissance ? fait-il entrer la Terre dans sa fécondité grâce à ses rayons lumineux et à leur chaleur ?
  • La Terre vous fournit-elle de quoi vous nourrir, vous vêtir, vous abriter, vous soigner, les matériaux nécessaires à l’ensemble des technologies que vous employez ?
  • La Terre et le Soleil vous apportent-ils de la douceur, du plaisir, par le biais de leur beauté, de leurs parfums, de la caresse du vent, de celle des vagues ?
  • L’eau est-elle le liquide primordial dans lequel est apparu la vie de nos ancêtres et est-ce celui dans lequel nous nous développons dans le ventre de nos mères ? Celui qui nous constitue à plus de 70% ?
  • Les roches constituaient-elles les premiers éléments de notre planète ? Et notre structure osseuse n’en porte-t-elle pas l’emprunte ?
  • L’ensemble de ces caractéristiques ne sont-elles pas celles que l’on pourrait attribuer à une mère, un père, et à leurs ascendants ?
  • Si vous répondez oui à toutes ces questions, est-il envisageable pour vous de ressentir à quel point l’unité est une expérience et non une croyance, et qu’il suffit de s’y reconnecter par nos sens ?

 

Si vous souhaitez plonger au coeur de ce sujet, je vous invite à retrouver deux épisodes du podcast Tout tourne rond sur cette Terre qui leur sont consacrés

  • l’épisode S1 3 , dans lequel j’explore avec Frederika Van Ingen la culture de ces peuples
  • l’épisode S1 5 , où je vous conte le Temps Profond, celui de la Terre et de la vie, depuis 4,5 milliards d’années, et la manière qu’ont ces peuples d’en prendre soin.
 
Deux séries documentaires magnifiques leur rendent hommage sur ARTE, en ce moment :
Gardiens de la forêt

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